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jeudi 24 juillet 2008

794 - L'éclair originel

A présent je sais.

Je sais sa puissance, sa violence, sa force, ses profondeurs, son radieux mystère.

Et son infinie légèreté.

C'est une énigme visible à l'oeil nu, un principe immatériel plus essentiel que la pensée, plus limpide que l'air, plus solide que le roc, plus durable que le temps. C'est une étincelle susceptible d'embraser une chambre, un champ, le globe terrestre, la galaxie, l'Univers : une intangible mais infaillible preuve de vie. C'est une onde qui fait rentrer le ver dans sa fange, sortir l'imbécile de son antre, frémir les ruisseaux, trembler les vivants, danser les morts, vibrer le monde entier.

Cette flamme voyageuse purement cosmique, quasi éthérique, certainement divine, miraculeuse, fragile, inextinguible, insaisissable, éternelle, magistrale, aussi éblouissante que dérisoire qui de l'atome à l'étoile fait disparaître toute zone d'ombre porte un nom.

Pour désigner cette essence universelle que l'on explique approximativement avec de savantes formules mathématiques, qui s'échappe toujours de nos éprouvettes pour fuir vers l'infini et qui pour cette raison précisément donne du prix à nos jours et une base inébranlable à nos certitudes, constatations ou théories scientifiques, religieuses, humaines, pour désigner cette chose née d'ailleurs, on prononce un mot humain, nécessairement humain.

LUMIERE.

mercredi 2 juillet 2008

INGRID BETANCOURT : UN SUCCES MEDIATICO-COMMERCIAL

La libération de madame Bétancourt est en soi un fait anecdotique et ne concerne réellement que la personne elle-même et son entourage. Le reste est pur matraquage médiatique de la population. Cette histoire n'aurait jamais dû concerner les millions de lobotomisés télévisuels mais exclusivement les gens qui étaient dans la partie : famille, amis, proches politiques.

Il ne s'agit pas des funérailles de Hugo ici, juste d'une épopée médiatico-pseudo-politique, voire simplement mondaine. Un roman-feuilletons créé par de vaniteux journalistes.

Les médias ont pris en otage des millions de personnes qu'ils ont captivées artificiellement avec leurs méthodes habituelles de manipulations des esprits. Après le grand matraquage des masses, ce sera l'adoucisseur larmoyant qui incitera à faire écouler un pavé relatant les six ans de captivité de Bétancourt, pavé publié en centaines de milliers, voire en millions d'exemplaires.

Bref, un excellent coup d'édition que les petits Machiavels de la presse devaient préparer depuis longtemps. Sa libération devait être attendue, commercialement parlant, depuis des années. Plus sa captivité durait, plus l'affaire prenait de la valeur. Le vin a bien vieilli depuis six ans, il n'en sera que meilleur en "produit-culturel" star des supermarchés.

Ce sont les médias et les médias seuls qui avec patience et perversité (saupoudrées d'une bonne dose de gravité étudiée) ont fait entrer dans le crâne de qui le voulait bien des vérités unilatérales, uniformes, univoques et racoleuses. Ils ont réussi à faire croire à des millions de gens qui étaient au départ parfaitement étrangers à cette affaire que Madame Bétancourt était leur cousine, leur camarade de classe, leur voisine de palier.

Sous prétexte d'humanisme les "créateurs d'actualité" ou "décideurs d'événements" monopolisent un fait, le médiatisent à l'échelle mondiale pour mieux niveler les sensibilités, les opinions et finalement faire converger les vues vers un seul horizon : celui choisi par eux, les médias.

Fatalement vendeur.

Aujourd'hui Bétancourt, à qui le tour demain de servir de prétexte au "média-marketing" ?

La libération de madame Bétancourt est un immense soulagement, je ne le conteste pas. Mais uniquement pour les gens concernés : otages, familles, amis. Pas pour les Marcel Dupont se croyant investis d'une mission dupontesque largement orchestrée par les médias avides de pouvoir, d'actualités à leur avantage, de vision du monde à sens unique...

Je n'ai aucune haine, juste une rage saine contre les manitous de la manipulation médiatique qui ont l'art de créer des événements à la mesure de leur intérêts mercantilo-vaniteux.

Je refuse de me faire lobotomiser par un groupe de prétendus journalistes-humanistes à la solde des marchands de lessive. Madame Bétancourt est une invention médiatique à but lucratif en sens large du terme : faire tourner la machine à "news".

L'exploitation éhontée de l'affaire Bétancourt à l'avantage de faire bêler les populations dociles, de détourner leur attention, de leur faire penser à autre chose qu'à l'essentiel. Les journalistes sont des charognards prêts à toutes les manipulations pour se sentir exister, tirant profit des causes les plus "flatteuses" pour ennoblir la profession à bon compte.

Certains prétendent que c'est l'opinion publique qui a libéré l'otage...

Faux !

Et quand cela serait vrai, est-ce une raison suffisante pour prendre en otage des millions d'esprits à des fins strictement privées, artificiellement montées en affaire d'Etat ?

Cette prise d'otage est à l'origine une affaire policière et non politique. Ce sont les médias qui ont fait de cette histoire une priorité nationale. Ce sont eux qui ont "réquisitionné" l'opinion, créé l'événement à des fins journalistiques. Bref, tout ceci n'est rien qu'une opération médiatique parfaitement arbitraire, savamment ciblée pour servir les intérêts d'une corporation. Les français dupes, pauvres moutons conditionnés par les médias, se réjouissent de la libération de celle qui il y a six ans encore était une parfaite inconnue... Vaste mascarade ! On fait pleurer dans les chaumières pour cette histoire mondaine pendant que le clochard du coin n'a droit à aucune attention médiatique, lui qui est pourtant pris en otage économique depuis, 10, 15, 20 ans par la société parfaitement indifférente sur son sort. Evidemment, Dédé Lacloche le SDF du quartier qui fait la manche à la sortie des magasins, c'est moins vendeur, moins romantique, moins à la mode que Ingrid Bétancourt, otage de "qualité, faire-valoir de la "pensée de référence" au visage bien photogénique et femme nécessairement "courageuse".

Bref, Bétancourt est un otage télégénique susceptible d'être reçu avec le tapis rouge.

Les médias, pervers, manichéens, sélectifs, ont fait insidieusement passer Bétancourt pour une héroïne par le simple fait de son statut d'otage. En six années d'habiles manoeuvres journalistiques quasi subliminales, le fait est établi dans les esprits.

A quand la légion d'honneur pour Bétancourt ?

(Que l'on ne se méprenne pas sur mon discours : il n'est nullement question ici de remettre en cause la légitimité de la libération de l'otage mais de dénoncer la prise d'otage médiatique, subtile celle-là, de millions d'esprits inaptes à la critique pour mieux les instrumentaliser. Si le but est louable, le procédé est malhonnête, anti démocratique, et même définitivement immoral. D'ailleurs on prétend fort judicieusement que sans les médias, la captive aurait été libérée plus tôt. L'effet pervers de l'écho médiatique de cette affaire est que plus on parlait de l'otage, plus il prenait de la valeur entre les mains de ses geôliers...)

L'affaire Bétancourt est un pur produit médiatique. Qu'on me laisse au moins la liberté de ne pas penser selon les normes de cette "presse émotive".

Moi, je suis un bel esprit, autrement dit un lion. Et surtout pas un âne, encore moins un mouton.

Raphaël Zacharie de Izarra

Mes détracteurs qualifient les hommes du FARC de méchants terroristes... Objectivement ils ne sont pas plus terroristes que les Résistants de la Seconde Guerre Mondiale, considérés eux aussi comme tels à l'époque par Vichy. Les hommes du FARC, même si ce sont des criminels, ont leurs raisons d'agir ainsi. Même si je n'approuve pas leurs méthodes, ils ont leur vérité et je peux comprendre que l'on puisse penser et agir à contre-courant des masses civilisées. Les états utilisent eux-mêmes les méthodes criminelles les plus ignobles pour maintenir leur légitimité de nantis et personne ne semble s'offusquer de la chose. La prolifération de la détention de l'arme atomique en est le meilleur exemple.

On qualifie les preneurs d'otages de terroristes. Derrière le mot TERRORISTE la réalité n'est pas toujours toute noire ou toute blanche.

Bref, le point de vue de mes contradicteurs n'est pas le leur mais celui instillé par les médias.

La presse demande à la population française de s'apitoyer sur le sort de Bétancourt et le peuple gagné d'avance par le discours des "gentils journalistes anti FARC" bêle en choeur ! Les médias auraient demandé de mobiliser la sensibilité nationale pour Dédé Lacloche le SDF du coin, aujourd'hui l'opinion publique ne jurerait que par Dédé Lacloche...

A partir du moment où la population dans son ensemble suit l'ornière des sentiments médiatiques, plus de place à l'esprit critique ! La prochaine étape de "l'émotion civique" consistera à acheter le livre-témoignage de la maintenant "très courageuse" et surtout si télégénique ex-captive...

Je n'ai rien contre la personne de madame Bétancourt. Je me sens juste offensé par l'outrance médiatique consistant à transformer des victimes en héros malgré eux du simple fait qu'ils ont été pris en otage. Ne confondons pas courage avec le simple état de captif-passif. Un otage ne peut rien faire d'autre que subir. Ce n'est pas du courage, c'est juste de l'immobilité forcée.

Le reste n'est que "romantisme médiatique" et fumée télévisuelle pour citadins pleins d'éphémère sensiblerie.

Pour en revenir à Dédé Lacloche qui semble décidément n'intéresser aucune de ces belles âmes réglées sur les mouvements de la baguette médiatique servant une musique bien sucrée, certes il n'est pas photogénique, certes il pue, certes il bredouille quand il a bu et qu'il fait la manche au coin de vos rues. Aucun caméraman ne fait de gros plans sur sa face rougeaude et pourtant il est là tous les jours, toujours otage de notre système terroriste économique particulièrement injuste, lui et des milliers d'autres. Dédé est à portée de caméra et pourtant aucune ne prend la peine de faire un scoop sur lui. Madame Bétancourt a une réelle valeur médiatique, pas le clochard du coin dont la solitude, la souffrance, la détresse sont parfois pires et plus durables que celles endurées par "l'illustre otage" lors de sa captivité.

Ce sont les médias qui ont choisi pour vous votre sujet d'émoi du jour : ils ne sont pas bêtes les médias, ils préfèrent servir de la Bétancourt plutôt que du Dédé, c'est beaucoup plus fédérateur.

Et pendant que les caméras braquées sur Bétancourt pour servir au peuple (artificiellement réjouit par la liberté retrouvée d'une pseudo-connaissance) sa dose de "news" sucrées à la gloire de "l'héroïne nationale", pendant ce temps-là Dédé Lacloche n'existe toujours pas, médiatiquement parlant. Il est pourtant sous nos yeux mais il n'a aucune valeur en terme d'image. Juste bon pour alimenter minablement les journaux de rues vendus par les SDF.

Beau travail messieurs les journalistes ! Un peuple entier lobotomisé en six années de savantes manoeuvres subliminales...

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Les médias s'accaparent l'honneur d'avoir fait libérer l'otage.

Comme le pensent certains, il est en fait très probable qu'elle aurait été libérée depuis lontgtemps si on avait laissé agir les forces diplomatiques dans l'ombre.

L'illusion médiatique fonctionne à merveille : tous pensent que la libération de la captive est à mettre sur le compte des journalistes. Le silence est d'or dit-on. Moi je suis persuadé que le silence diplomatique aurait été plus efficace que le fracas de la presse.

Evidemment, tout est orchestré de manière à donner l'impression que ce sont les trompettes médiatiques qui ont rendu sa liberté à Bétancourt : shows télévisés sur shows télévisés, tapis rouges et sourires présidentiels sont là pour faire écran.

Les médias n'ont fait que retarder sa libération mais qu'importe, tout fonctionne sur le modèle illusoire : ainsi ils décrètent que le soleil se lèvera à telle heure sous leur seule volonté et miracle, le soleil se lève effectivement à l'heure indiquée par les médias...

Conclusion spécieuse des sots : c'est grâce aux médias que l'astre brille !

Raphaël Zacharie de Izarra

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Vraiment comique et pitoyable, la dérive se poursuit sur les BLOGS : l'ex-captive est maintenant accommodée à diverses sauces : "Bétancourt les images", "Bétancourt les retrouvailles", "Bétancourt en famille", "Bétancourt avec Sarkozy", etc.

Quand je disais que l'affaire Bétancourt était une cause nationale créée de toutes pièces par les médias...

Attendons-nous bientôt à : "Bétancourt et ses recettes de cuisine", "Bétancourt le Loft", "Bétancourt et ses secrets de beauté"...

mardi 1 juillet 2008

793 - Lettre aux publicitaires

La publicité ramollit la cervelle du citoyen moyen, et cela d'autant plus que des esprits dégénérés ont osé l'élever au rang de l'Art... Ce dernier point est pervers car oser élever les ritournelles et saynètes "lessivières" au rang de l'Art est un argument commercial mensonger supplémentaire (subtil et détourné) en faveur des yaourts, des chaussettes, des pneus de voitures et de leur glorification par ce procédé prétendument artistique.

A l'exemple de l'église de scientologie qui n'est devenue légalement une "église" que pour entrer dans un cadre fiscal plus avantageux mais aussi pour devenir plus respectable sur le plan moral. Avant d'obtenir son statut d'église, la scientologie était une vulgaire secte à but hautement lucratif. Aujourd'hui elle plume autant de pigeons qu'avant et avec la même énergie, sauf qu'elle le fait dans un cadre plus officiel, ce qui la met à l'abri des foudres de la loi.

Il en est de même en ce qui concerne la publicité : c'est une vaste opération de manipulation des esprits faibles à but strictement mercantile, une espèce de poison culturel qui de manière agressive s'étend sur le monde et dans les esprits depuis maintenant deux ou trois générations. La publicité est une machine tentaculaire destinée à fabriquer des abrutis assoiffés de coca-cola, et ce depuis des décennies. Voici une lettre destinée à des gens que bien des naïfs assimilent sottement à de "géniaux créatifs"...


Messieurs les créateurs,

Je vous qualifie de "créateurs" mais ce n'est pas ironique du tout. Vous êtes de très grands esprits, des gens utiles, des hommes libres.

Mieux : des "artistes".

L'art de prendre les êtres humains pour des minables, c'est un métier. Une vocation. Il faut être né avec du souffle dans la cervelle, je veux dire une chambre à air, bref avoir ça dans le sang, aimer faire du vent avec rien, ou plutôt aimer faire du rien avec du vent, l'air de rien.

L'engagement pour la cause publicitaire, ça s'apprend, ça se mérite. Je vous comprends... De tels efforts, ces études poussées, tant d'argent dépensé, ces belles énergies, toutes ces réflexions pour rendre bêtes et laids vos semblables, cela ne mérite-t-il pas d'immortelles statues en nouille ?

Vous êtes admirables messieurs les publicitaires.

Vous êtes indispensables surtout, vous qui embellissez les esprits sur papiers glacés, approfondissez les grandes questions du siècle plus blanc que blanc, habillez les abrutis (mais attention je parle des vrais abrutis-maisons, ceux qui rigolent et même qui semblent se pâmer sexuellement quand on les filme avec leur pot de yaourt), dénudez les têtes, vous qui savez mieux que quiconque ce qu'il faut mâcher, vous qui calculez au gramme près combien de légumes il faut manger quotidiennement pour ne pas que l'on devienne obèse, vous qui connaissez les secrets millénaires des ânes, des vaches et des petits pois, vous qui débitez des vérités fluides comme du plasma au son de violons numériques, vous qui décrétez que le sang menstruel de nos femelles aseptisées est bleu... Sans vous, avec quoi meublerait-on nos écrans, que lirait-on dans nos journaux, que penserions-nous dans nos pauvres têtes du matin au soir ?

Et surtout, que mangerions-nous ? Des patates ? Tous les jours des patates ! Ce serait l'enfer sans vous, messieurs les publicitaires. Pardon, messieurs les "artistes".

Merci de nous éclairer. Grâce à vous on mange cinq fruits et légumes par jour. Sur vos conseils on sait comment faire pour devenir intelligents, propres, bien chaussés, bien lavés, bien nourris, ipodés, protégés. Même nos cheveux brillent.

Vos vérités nous rendent beaux, bons, bien vêtus et même immortels. Les morts sont des ringards : ils ne vous écoutent pas les pauvres !

Avec les shampoings qui font luire nos trésors capillaires, nous les vivants on a des idées nouvelles sous le crâne. Vous nous avez sauvés, messieurs les "artistes" !

Votre merde a l'apparence de la merde, l'odeur de la merde, le goût de merde.

Et c'est effectivement de la merde.

Mais vous la vendez au prix de l'or, alors là vraiment je vous dis chapeau les "artistes" !

lundi 30 juin 2008

792 - Marie-Josette et Arthur

Marie-Josette, célibataire dans la fleur de l'âge, n'a pas vraiment conscience d'être un authentique laideron. Du moins elle semble vouloir l'ignorer.

Ou pire : feindre de croire être une belle femme.

Certes elle arbore une grande chevelure blonde assez impressionnante qui la rend réellement séduisante vue de dos, certes elle a une large dentition bien carrée à faire enrager de jalousie une californienne de souche, certes elle se maquille avec goût et sa toilette est toujours luxueuse. Il n'empêche, Marie-Josette quand on la voit de face, avec ou sans fard, est ce qu'on peut appeler une femme laide.

Et même fort laide, pour être juste.

Ajoutons que son abyssale bêtise n'arrange rien au tableau déjà peu reluisant de sa personne physique.

Marie-Josette non contente de n'avoir point de poumons, ni de hanches, ni de flancs, ni de grâces, ne possède pas plus de cervelle. Bref, elle n'a rien de ce qui fait les charmes habituels d'une femme. Privée de l'essentiel, elle se rattrape sur le superflu : Marie-Josette, en effet, affectionne singulièrement la compagnie du vent, la contemplation incessante de ses souliers vernis, s'enquérant auprès de son concierge des rumeurs colportées par les journaux mondains, bavardant à n'en plus finir avec sa boulangère sur tout et rien.

Un jour, sous l'empire d'une de ses furies utérines elle s'ingénia à chercher l'ivresse charnelle au-delà des bornes de sa réflexion et de ses moyens de séduction : elle fit des propositions libidineuses à un Apollon (nommé Arthur) deux fois moins âgé qu'elle et vingt fois plus attrayant.

L'inconcevable se produisit : l'éphèbe ne repoussa pas l'indigente, fit honneur à sa féminité absente, ne rechignant pas ensuite à s'afficher publiquement avec cette blonde chamelle au cerveau d'autruche.

Ils sont toujours ensemble, le prince charmant ayant été fidèle à sa Cunégonde écervelée. Ils n'ont pas eu d'enfants mais plein de critiques et se consolent de leur stérilité par des satisfactions égoïstes.

De quoi s'interroger sérieusement sur les mystères de l'amour...

mardi 17 juin 2008

791 - Le citoyen de base est un minable

Le socle de la société est composé d'hommes ordinaires sans histoires ayant des préoccupations à la hauteur de leurs pieds.

Minus de naissance, ils suivent l'ornière avec des espoirs "d'ascension bancaires", attendent pendant des années leurs promotions d'employés, de comptables, leurs augmentations de salaire de chauffeurs-routiers, leurs réductions d'impôts d'ouvriers spécialisés ou de patrons d'entreprises, aspirent à rembourser leurs maisons achetées à crédit, passent leur temps libre à s'engraisser le corps tout en se vidant l'esprit, sont contrariés -voire franchement énervés- par une rayure sur la portière de leur voiture, vivent avec des soucis d'assurés, meurent avec des rêves de retraite qui ne sortent jamais de leurs têtes. Chez eux la perspective de la retraite est comme un appendice mental, un mystère quasi génétique dont ils ne parviennent définitivement pas à faire abstraction. Ils appellent cela un "acquis social". Pour eux c'est sacré, la retraite. Tellement essentiel qu'ils passent leur existence à l'attendre.

Précisons que ces minables qui travaillent toute leur vie pour se constituer une retraite meurent souvent avant la retraite, ce qui prouve que la justice divine existe, au moins en ce qui concerne les abrutis.

Du berceau à la tombe ces citoyens ordinaires rasent le sol de leurs pensées triviales, caressant des chimères aussi volatiles que des gains de LOTO, aussi clinquantes, plates, vulgaires, superficielles que des écrans de télévision à plasma.

Pour eux les vacances sous les cocotiers représentent le sommet de la félicité. Ils sont fiers de leurs automobiles. Ils vont aux enterrements avec des lunettes noires, fêtent leur anniversaire tous les ans de leur vie, se promènent aux Champs-Elysées en famille, sont farouchement opposés à la chasse mais pas contre leur "steak" du midi. Bien entendu leurs habitudes alimentaires sont infâmes, grossières, voire ignobles. Mais eux ne voient rien, c'est le principal.

Leur morale se borne au code civil. Leur bonté est basée sur les arguments commerciaux des publicistes. Leur vue humaniste est réglée sur les fluctuations économiques. Les pieds bien sur terre, jamais ils ne décollent.

Il faut toutefois reconnaître leurs mérites : assoiffés de confort aussi bien mobilier qu'intellectuel, ils font d'excellents patriotes, de bons ouvriers, des pions dociles pour le marketing, la politique, la télévision.

Ce sont les citoyens de base. Ils sont gentils, aimables, parfois même assez courtois. Il n'empêche que ce sont des minus, des infirmes de l'esprit, des atrophiés de l'âme, des pauvres types pour qui la mort se résume à des préoccupations strictement funéraires : le choix du "prestataire de services", voilà ce qui compte pour eux.

dimanche 8 juin 2008

790 - Morphéose et Ophyngiée

Morphéose était singulièrement belle, quoique infâme par le caractère. Eprise d'un verveux et indifférent éphèbe nommé Ophyngiée auquel elle prodiguait un amour étrange et désespéré, elle perdait son temps à essayer de le séduire.

Lui était égoïste et cruel, même si paradoxalement on lui trouvait des qualités humaines incontestables.

Bref, Ophyngiée recevait la flamme de Morphéose avec froideur, voire avec les plus féroces railleries selon qu'il avait mangé ou non à satiété la veille au soir ou selon la température qu'il faisait dans la région, tandis qu'à côté de cela il consacrait temps, énergie et argent à aider des orphelins en Espagne.

Morphéose se mourrait de langueur pendant que l'objet de ses feux se dévouait sans compter à ses oeuvres charitables. Un jour, lassée de la goujaterie de l'adonis au coeur ambigu l'amoureuse éconduite tenta le tout pour le tout : elle lui ouvrit son corsage sous le nez afin qu'il pût apprécier le prix de ses ardeurs, la profondeur de ses sentiments, la sincérité de ses vues.

Heurté par tant d'impudeur Ophyngiée répondit à cette provocation mammaire par une moue hautaine à peine forcée qui fit sur Morphéose un effet encore plus insupportable que son ordinaire indifférence.

Ils se marièrent cependant, eurent un seul enfant qu'il appelèrent sobrement François, vécurent une dizaine d'années sans histoire avant d'envisager une séparation. La perspective joyeuse d'un célibat retrouvé eut raison de leurs dernières réticences.

François fut abandonné aux bons soins d'une institution religieuse fort sévère, ce qui permit aux parents déçus de leur mariage de trouver une paix qu'ils avaient longtemps cherchée.

Morphéose profita de sa nouvelle liberté pour s'adonner à l'art de la couture et de la broderie. Ophyngiée quant à lui, n'ayant plus d'orphelins espagnols pour occuper son temps se tourna définitivement vers l'étude stérile des étoiles, n'ayant aucune compétence scientifique en ce domaine.

mercredi 4 juin 2008

789 - Tante Jeni

Aujourd'hui dimanche, pour la jeune et joyeuse famille c'est jour de visite chez tante Jeni, vieille célibataire roumaine arriérée à la mentalité, aux moeurs et au corps définitivement rigides

La vieille parente porte avec mauvaise humeur ses soixante années de chasteté hargneuse. Elle reçoit avec ostensible retenue les bambins et leurs géniteurs qu'elle appelle d'ailleurs "géniteurs" afin de bien faire comprendre aux invités que son coeur est un glaçon en forme d'arête... Chez elle les embrassades familiales, c'est mi bise, mi gifle. Les enfants incarnant à ses yeux le "péché du plaisir conjugal", elle tire grand orgueil de son célibat qui a préservé ses flancs de toute "souillure" et ne manque jamais une occasion de rappeler la "pureté" de son hymen à sa nièce pleine de joie et de vie ayant enfanté trois fois... Ce qui pour tante Jeni équivaut à une triple damnation.

Ce puits de haine, de bêtise et de sécheresse en chignon amuse beaucoup ses hôtes à la vérité ! Tante Jeni est laide, sotte, méchante, et c'est bien ce qui fait son prix. Qui d'ailleurs ignore les vices cachés de l'hypocrite ? Même les enfants savent les secrets de la vieille chèvre. Après la messe du dimanche, combien de fois l'a-t-on vu s'attarder sur la statue de Saint Sébastien, reluquant d'un oeil pervers ce corps lascif percé de flèches, allant jusqu'à baiser avec fausse ferveur les pieds du plâtre ? Même le curé qui n'a jamais été dupe de sa piété frelatée observe son manège, encore plus amusé que les autres.

Tante Jeni est, il est vrai, son ouaille la plus fidèle. Et la moins crédible. L'exemple type pour les autres de ce qu'il ne faut pas être. Cela dit son curé est miséricordieux, indulgent, charitable envers cette coche libidineuse déguisée en sainte icône.

Le plus drôle chez tante Jeni, c'est sa manie de nettoyer avec acharnement les poignées de portes de sa chaste et mortelle demeure une fois les invités partis... Tante Jeni, obsédée par le plaisir sexuel et ses mystères, suspecte sa nièce et son époux d'avoir copulé juste avant leur visite. Idée insupportable pour cette vieille carne acariâtre, ce qui justifie les réactions hygiéniques les plus extrêmes ! Jusqu'au grotesque, l'hypocrite ne craint pas de prouver le degré de sa "très grande pureté" en allant jusqu'à exhiber à qui veut les voir les chiffons artificiellement souillés ayant servi au nettoyage des poignées de portes après la visite de sa nièce et de sa famille ! Elle pousse parfois le vice jusqu'à conserver les chiffons usagés pendant toute la semaine afin de les montrer à la nièce le dimanche suivant.

Alors, avec un air plein de dignité, toute triomphante, elle étale devant sa nièce les chiffons ayant servi à la désinfection des poignées de portes de sa maison de "femme honnête", tandis que mentalement elle profère les injures les plus immondes à l'adresse de la jeune mère qui silencieusement l'écoute avec un mélange de lassitude et de pitié amusée...

Tante Jeni est un trésor, sa nièce le sait. Un trésor de monstre humain échappé d'un roman pittoresque et improbable, lui-même issu d'un siècle qui n'a jamais existé... Tante Jeni n'est pas de ce monde.

Et c'est d'ailleurs pour cela qu'elle existe, la tante Jeni : parce qu'aucun romancier n'aurait pu concevoir ce personnage, s'il n'existait réellement.